Un salarié travaillant pour La Redoute au sein du site logistique de Wattrelos a été sanctionné d’une mise à pied d’un jour. Le motif ? Avoir mangé une clémentine sur son lieu de travail.
Les faits sont les suivants: Ce préparateur de commande aurait, le 7 novembre 2017, profité d’une courte panne de la chaîne de production pour manger une clémentine, dont il aurait laissé les épluchures sur son poste de travail.
S’en est suivi une sanction disciplinaire, qui a été contestée puisque nous avons été gratifiés ce jeudi 14 novembre d’une décision du Conseil de prud’hommes de Roubaix, décision qui a débouté le salarié de ses prétentions visant à annuler ladite sanction.
Bien entendu, cette dernière est vivement décriée par les syndicats et pour cause, ce salarié est par ailleurs affilié à la CGT dont il est un représentant syndical.
Les arguments du requérant étaient prévisibles. Le salarié n’aurait pas mangé sa clémentine sur son temps de travail ni même sur son poste de travail. Si encore une sanction était possible, la réponse disciplinaire de l’entreprise était largement disproportionnée.
Rappelons dans un premier temps que, pour les entreprises d’au moins 20 salariés, une sanction disciplinaire n’est valide que si elle est prévue par le règlement (Article L1311-2 du Code du travail). En outre, la durée maximale de la mise à pied doit être prévue (Cass. soc., 26 oct. 2010).
En l’espèce, manger sur la chaîne de production était interdit par le règlement intérieur de l’entreprise. Par conséquent, il semble difficile de contester la validité de cette sanction disciplinaire en arguant qu’elle n’avait aucune base contractuelle ou légale.
L’argument principal consistait à considérer que le comportement répréhensible du salarié a été effectué en dehors du temps de travail. Cet argument ne peut davantage prospérer.
En effet, la Cour de cassation a pu considéré que, bien que ne pouvant être assimilées au temps de travail effectif du salarié, les pauses-repas prises sur le lieu de travail du salarié sont bel et bien liées au travail (Cass. 2e civ. 27 nov. 1975, Bull. civ. II, no 319, RTD civ. 1976.552, obs. G. Durry).
Cette connexion avec le lieu de travail justifie pleinement l’application de toutes les dispositions pertinentes du règlement intérieur de l’entreprise,
C’est sûrement sur ce point que le débat pourrait se cristalliser en cas d’appel de la décision rendue ce 14 novembre par le Conseil de prud’hommes de Roubaix.
En effet, l’article L1333-1 du Code du travail dispose qu’il est possible pour le juge prud’homal de vérifier si « les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction ». Ce même article précise que si un doute existe, celui-ci « profite au salarié ».
Cet article confirme que si l’employeur estime qu’un comportement est fautif en vertu du règlement intérieur de l’entreprise, son appréciation ne s’impose pas au juge. Cette disposition s’applique également à une autorité ordinale assurant une mission disciplinaire (Cass. soc., 7 nov. 2006, n°04-47.683, Bull. civ. V, n° 325).
Il y a t-il ici contestation possible sur la justification d’une telle mesure disciplinaire ? Il y a-t-il même un doute ? En l'occurrence, le respect de règles d’hygiènes strictes dans certaines chaînes de production est susceptible de justifier une mise à pied.
Ainsi, en cas d’appel, il faudra alors se reposer sur l’appréciation souveraine du juge judiciaire pour savoir si la clémentine était réellement de trop au sein de cette chaîne de production...
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